Une étude commandée par la Fondation MasterCard révèle un constat préoccupant : 60 % des fonds d’investissement destinés à l’Afrique sont domiciliés en dehors du continent. Cette situation met en lumière un défi majeur : l’Afrique peine à s’imposer comme une place financière incontournable.
Des juridictions plus attractives ailleurs
Les investisseurs internationaux privilégient les marchés offrant des régulations stables, des contrats respectés et un cadre juridique prévisible. Le Luxembourg, par exemple, gère 5 000 milliards de dollars d’actifs et attire les capitaux grâce à un modèle bien rodé. À l’inverse, plusieurs pays africains souffrent de bureaucratie lourde, d’instabilité macroéconomique et de réglementations floues, freinant ainsi l’arrivée des capitaux nécessaires à la croissance.
Cette réalité impacte particulièrement les Petites et Moyennes Entreprises (PME), qui représentent 80 % des emplois formels en Afrique. Selon le rapport 2024 sur la domiciliation des fonds en Afrique, le déficit de financement des PME atteint 940 milliards de dollars, limitant ainsi leur développement et la création d’emplois.
Des exceptions : Maurice, l’Afrique du Sud et le Rwanda
Si la majorité du continent peine à attirer les capitaux, certains pays africains ont su tirer leur épingle du jeu :
- L’île Maurice est aujourd’hui un hub financier reconnu, accueillant 20 milliards de dollars d’investissements grâce à une fiscalité avantageuse et des régulations claires.
- L’Afrique du Sud, avec son secteur financier robuste, voit ses fonds de pension investir massivement dans l’économie locale. L’Asset Owners Forum of South Africa a notamment mobilisé 500 millions de dollars pour des projets nationaux.
- Le Rwanda, via le Kigali International Financial Centre, s’est spécialisé dans des niches telles que la technologie et l’impact social, attirant ainsi des financements ciblés.
Un retard persistant pour d’autres économies
D’autres pays, pourtant dotés d’un fort potentiel économique, restent en retrait. Le Nigeria, première puissance économique d’Afrique, peine encore à structurer un marché financier attractif, malgré des actifs publics estimés à 43,6 milliards de dollars. De leur côté, la Côte d’Ivoire et le Togo tentent de se positionner comme hubs régionaux, mais les résultats restent timides.
Vers un changement de cap ?
Pour inverser cette tendance, les États africains doivent simplifier leurs régulations, renforcer la sécurité juridique et mobiliser les capitaux locaux. Des institutions comme les Caisses nationales de sécurité sociale, les Caisses des dépôts et consignations, les Fonds de pension et les Banques publiques de développement doivent devenir des moteurs de financement pour les PME, les infrastructures et l’innovation.
Actuellement, les fonds de pension africains représentent 600 milliards de dollars d’actifs, un montant qui pourrait atteindre 7 300 milliards de dollars d’ici 2050. Cette manne financière, si elle est bien exploitée, pourrait stimuler les investissements privés et réduire les risques perçus par les investisseurs étrangers. Mais pour cela, les économies africaines doivent cesser de rester dans l’ombre des grandes places financières internationales et affirmer leur rôle dans l’avenir économique du continent.